La fonction Conformité a profondément évolué ces dernières années. Anciennement logée dans sa « tour d’ivoire », elle s’est décentralisée et réorganisée pour être au plus proche des métiers opérationnels. Cette évolution contribue-t-elle à l’attractivité de l’entreprise ? à sa compétitivité ? Réponse avec nos expertes de CACEIS.
La Conformité règlementaire, qui désigne essentiellement le respect des réglementations par l’entreprise et ses collaborateurs, est-elle une contrainte de plus ?
Une étude initiée par la Commission Européenne, à laquelle CACEIS a participé en 2019, avait pour objectif d’estimer les coûts, pour les banques, de la mise en conformité avec les réglementations financières introduites ou modifiées après 2008 par l'Union européenne, et des obligations de déclaration prudentielle en particulier. Chaque institution qui s’est prêtée au jeu n’a pu que constater un accroissement des coûts du fait d’une règlementation galopante et foisonnante.
La Conformité est-elle réellement une source de coûts et un frein à la compétitivité des banques ? Si oui, est-ce déplacé d’associer compétitivité et conformité ? À y regarder de plus près, l’exercice apparaît fort instructif et encourage à porter un autre regard sur cette fonction…
La règlementation, qu’elle soit locale, européenne ou internationale, génère des dépenses d’application non négligeables du fait de l’accroissement des ressources nécessaires à leur mise en œuvre. Ainsi, la Direction de la Conformité de CACEIS a dû s’adapter : les équipes en charge de la doctrine se distinguent désormais des équipes de la Conformité Métiers, elles-mêmes dissociées de celles de la Sécurité Financière.
Ces spécialisations au sein de la fonction Conformité, qui existent depuis peu, se sont également concrétisées au sein de l’AFTI, l’Association Française des Professionnels des Titres, représentative du post-marché en France. En effet, si les sujets de conformité et de sécurité financière peuvent se rencontrer, force est de constater que les experts d’un sujet ne sont pas forcément les experts de l’autre. « Ce constat très clair a ainsi présidé à la création du groupe de travail sur la sécurité financière l’année dernière » précise Éliane Méziani – Senior Advisor, Public Affairs à CACEIS et animatrice de ce groupe au sein de l’AFTI ; « Les sujets abordés sont nombreux et concernent en particulier la cybersécurité, les procédures LCB-FT et de KYC, etc. » poursuit-elle.
Les coûts liés à la Conformité ne se limitent pas aux actions visant à leur bonne application mais comprennent également celles liées au temps nécessaire de familiarisation et d’acculturation. Les règlementations récentes comportent même une obligation de formation des collaborateurs aux nouvelles exigences, souvent portée par la Conformité. Les charges induites par le processus de compréhension des exigences réglementaires, d’adaptation et d’administration (par exemple la mise en place de reporting, les déclarations aux administrations et autorités de tutelle) peuvent de facto avoir un impact notable sur les coûts.
Il convient également de souligner les différences qui peuvent exister entre les pays européens lors de la transposition des directives européennes en droit national. Celle-ci peut en effet être source de surrèglementation, laquelle a été pointée du doigt, dès 2017, par le Premier Ministre français de l’époque, Édouard Philippe. « Les surrèglementations existent pourtant depuis toujours dans nos matières et sont évidemment source de coûts de conformité supplémentaires », confirme Eliane Méziani.
Les coûts de la Conformité sont également indirects : les inspections et contrôles nationaux, coûteux et trop fréquents visant à vérifier la mise en conformité avec la législation européenne, peuvent augmenter les frais. En effet, le temps consacré à la réponse aux régulateurs peut s’avérer conséquent et est toujours prioritaire par rapport aux missions courantes de conseil et de contrôle de la fonction. Pour autant, ce contrôle extérieur est indispensable pour assurer et maintenir le niveau de conformité de la banque ou du prestataire.
Alors dans ce contexte : peut-on associer Conformité et Compétitivité ? Des arguments permettent de confirmer cette assertion, que ce soit à CACEIS ou tout établissement financier. En effet, la mise en place de procédures préventives évite de s’exposer à des risques* liés au non-respect de la réglementation.
Ce rôle régalien de la Conformité encadre les risques de réputation, financiers, judiciaires et extra-judiciaires. Éviter les sanctions et protéger la réputation de CACEIS permettent de mettre en valeur le Groupe et ses entités, et l’offre de services avec un impact client évident. La Conformité s’inscrit également dans une logique de développement de relations pérennes propices au professionnalisme et à la qualité du service rendu. Elle permet le développement de standards de qualité, élément de crédibilité et de confiance des clients et partenaires.
« Autre point clé pour CACEIS : une culture conformité solide et une formation continue aux enjeux et aux risques de nos métiers engendrent une fidélisation des collaborateurs et contribue à l’attractivité de l’entreprise, et ainsi à un cercle vertueux allant dans le sens de la qualité du service. A titre d’exemple, CACEIS a pu promouvoir en interne le dispositif de certification professionnelle AMF en le proposant au-delà de la population strictement visée par la réglementation » explique Elisabeth Raisson, Group Head of Business Compliance à CACEIS.
Si la robustesse du dispositif de conformité est visible au quotidien à CACEIS, la crise sanitaire a particulièrement mis en valeur l’importance de cette dernière dans le maintien de ses activités. De manière très concrète, la Conformité a su montrer l’importance de son action dans cette période difficile en contribuant à maintenir la qualité de la prestation dans un environnement dégradé. Les équipes de conformité ont su réagir par la mise en place de dispositifs ad-hoc sans dégrader le niveau de risque règlementaire. « Même si ces adaptations ne se sont pas faites facilement (mobilisation des bons interlocuteurs, gouvernance, suivi des décisions….), notre organisation a permis une réactivité et une efficacité dans un contexte impossible à imaginer avant la crise. Nous avons resserré les liens avec les métiers opérationnels, chacun se montrant à l’écoute des contraintes inédites posées à l’autre » indique Elisabeth Raisson.
Eliane Méziani ajoute : « A CACEIS, la fonction de conseil de la Conformité est également présente afin de servir les métiers et les fonctions commerciales. L’analyse de la règlementation qui s’impose à nos clients, sans nécessairement s’imposer à CACEIS, permet d’anticiper l’évolution de l’offre et d’accompagner les clients : c’est aussi là que réside la compétitivité et c’est l’affaire de tous à CACEIS, pas uniquement de la fonction Conformité ».
La Conformité est bien un centre de coûts mais elle est surtout créatrice d’une bonne réputation, implantant et inculquant des principes partagés d’éthique. Elle ne peut néanmoins poursuivre ce but que si ces valeurs sont partagées et assimilées par tous.
« Une conformité centrale, logée dans sa tour d’ivoire, posant les règles sans échanger avec les métiers ne pourrait pas atteindre ses objectifs propres et ne servirait ni l’intérêt des clients ni celui du Groupe. La conformité a dépassé depuis longtemps la simple fonction de contrôle, pour se positionner en partenaire du développement, en amont des projets. A CACEIS, l’organisation décentralisée, avec une présence de la fonction dans toutes les entités internationales, permet d’appréhender les besoins et de construire des principes assimilables par tous, autour de valeurs partagées et de la raison d’être du Groupe. Elle est ainsi un véritable outil de compétitivité » conclut Elisabeth Raisson.
* Le « risque de non-Conformité » est défini comme le risque de sanction judiciaire, adminis¬trative ou disciplinaire, de perte financière significative ou d’atteinte à la réputation, qui naît du non-respect de dispositions propres aux activités bancaires et financières, qu’elles soient de nature législative ou réglementaire, ou qu’il s’agisse de normes professionnelles et déon-tologiques, ou d’instructions de la Direction.