Véritable serpent de mer, la « settlement discipline » prévue par le règlement CSDR entrera bien en vigueur au 1er février 2022. Néanmoins, surprise de fin d’année, le régime de rachat obligatoire sera exclu de l’entrée en application. CACEIS explore les raisons et les implications de ce report qui pourrait constituer une opportunité pour mettre en valeur l’efficacité du régime de pénalités.
Le 1er février 2022, le règlement délégué n°2018/1229/EU – amendant le règlement CSDR (Central Securities Depositary Regulation) (909/2014/EU) - entrera finalement en vigueur. Pour rappel, les objectifs principaux de cette réglementation sont d’améliorer la sécurité et l’efficacité du règlement-livraison des titres, et de définir un cadre prudentiel harmonisé pour superviser les activités des dépositaires centraux de titres (DCT) au sein de l’espace économique européen.
Reportée à plusieurs reprises en 2020 et 2021 par les pouvoirs publics européens en raison de la pandémie mondiale, cette règlementation était très attendue par l’ensemble des acteurs de services financiers car elle a des conséquences importantes en termes d’obligations sur le règlement/livraison.
La discipline de règlement prévoyait en effet un certain nombre de dispositions visant à prévenir les défauts de règlement et donc à fluidifier les échanges. Le texte instituait ainsi des sanctions en cas d’échec des transactions (via un système de pénalités) et également – ce qui a fait grand bruit – des exigences de rachat obligatoire (buy-in) dans ce cas précis.
En janvier 2020, ces dispositions très contraignantes pour une industrie en quête de stabilité réglementaire ont largement motivé l’action concertée de 14 associations professionnelles européennes (dont l’AFTI, l’EACB, la FBE ou encore l’AFME* au sein desquelles CACEIS participe) afin d’alerter l’ESMA (European Securities and Markets Authority) sur les conséquences délétères d’une entrée en vigueur prématurée de la discipline de règlement. L’ESMA a réagi en adressant à la Commission européenne une lettre de demande officielle de report en premier lieu au 1er février 2021, puis au 1er février 2022, ce qui fut accepté.
Saluant largement la décision des institutions européennes d’un report, l’industrie financière et CACEIS se sont largement engagés dans le processus d’adaptation de leurs systèmes d’information afin d’être en conformité avec les dispositions au 1er février 2022.
Les délais accordés se sont avérés très courts, les acteurs européens des services financiers ont néanmoins pu mettre en œuvre les obligations liées au reporting des échecs de transactions et aux pénalités en espèces. Alertée à nouveau en juillet 2021 par l’industrie sur des besoins de clarification et la complexité du régime de rachat obligatoire, l’ESMA a demandé à la Commission européenne un nouveau report pour ce volet spécifique.
Le 24 novembre dernier, la Commissaire européenne en charge des Services Financiers a annoncé que le régime de rachat obligatoire n’entrerait finalement pas en vigueur le 1er février 2022. « Ce report, adopté sous la forme d’un cavalier législatif introduit lors des négociations des autorités européennes sur le règlement Régime Pilote, reste néanmoins flou quant à sa durée et questionne sur les ambitions de la Commission sur le futur régime de rachat obligatoire », précise Eliane Méziani, Senior Advisor – Public Affairs à CACEIS.« L’ajournement pourrait être, selon les observateurs, de 2 à 3 ans, ce qui dénote clairement par rapport aux reports habituellement appliqués à d’autres réglementations européennes ».
Daniel Pascaud, Global Head of Operations, Banking & Custody Solutions à CACEIS, considère que ce ne serait pas la première fois qu’un texte complexe à implémenter fasse en premier lieu l’objet de plusieurs reports, puis soit définitivement abandonné. « Cependant, tempère-t-il, la question ne se pose pas encore en ces termes et il convient, à ce stade, de saluer la décision des autorités européennes. Le régime de rachat obligatoire nécessitait en effet de plus amples clarifications, contrairement aux autres volets de la discipline de règlements, comme les pénalités en espèces. Ce report permettra donc aux acteurs des services financiers de stabiliser le régime des pénalités et aux pouvoirs publics d’évaluer l’intérêt d’un système de rachat obligatoire dans ce contexte. Ce dernier devrait être limité aux opérations les plus à risque et non à toutes, comme c’est le cas aujourd’hui », rappelle-t-il.
L’entrée en vigueur de la discipline de règlements constitue à ce titre une opportunité pour CACEIS de démontrer la fiabilité et la robustesse de ses systèmes et processus opérationnels liés au règlement-livraison de titres, sans la nécessité d’un système de rachat obligatoire.
Pour accompagner ses clients dans le cadre de la mise en œuvre de CSDR, CACEIS a fait évoluer ses services et ses solutions autour des 2 principaux axes de la réglementation : la prévention (avec notamment des procédures renforcées de confirmation des transactions afin de faciliter et encourager les dénouements en bonne date) et la remédiation avec les sanctions pécuniaires. Le site collaboratif clients de CACEIS, OLIS, apportera de nouvelles fonctionnalités dans ce sens.
CACEIS restera par ailleurs particulièrement vigilant dans les semaines et les mois à venir sur la définition du régime de rachat obligatoire, suite à la future revue du règlement CSDR qui devrait intervenir en 2022. « Nous espérons que cette refonte aboutira à la mise en place d’un régime plus approprié et dont la mise en œuvre ne pénalise pas les acteurs européens des marchés financiers », conclut Daniel Pascaud.
* AFTI: Association Française des Professionnels des Titres
EACB : European Association of Co-operative Banks
EBF : European Banking Federation
AFME : Association for Financial Markets in Europe